L’histoire du québécisme antépisode est digne d’une véritable saga?
De la suite dans les idées
Nous sommes toutes et tous, à des degrés divers, adeptes de téléséries, de romans ou de films, surtout quand ils s’inscrivent dans une séquence dont nous attendons la suite avec impatience. Que nous réserve le prochain épisode? Y en aura-t-il encore plusieurs? Comment l’intrigue se dénouera‑t‑elle?
Pour assouvir cette soif ou ce besoin de continuité et pour satisfaire leur public, des scénaristes d’œuvres de fiction, notamment dans le domaine cinématographique ou télévisuel, ont eu la brillante idée de prolonger leur œuvre en réalisant des épisodes qui situent les personnages et l’action avant ceux des épisodes déjà diffusés.
Le coup de l’analepse
Ce retour dans le temps permet d’en apprendre davantage sur le passé de nos personnages préférés ainsi que sur les événements qui ont précédé les intrigues ayant gagné la faveur populaire. À ces nouveaux épisodes, qui nous font remonter le temps de la trame narrative, il fallait bien trouver un nom. L’anglais a formé prequel, à l’aide de pre‑ « avant » et de ‑quel (élément de sequel « suite dans une œuvre de fiction »). Le terme anglais prequel et ses adaptations préquel ou préquelle figurent dans des dictionnaires français avec la marque « anglicisme ». Comme ces emprunts ne sont ni transparents sur le plan du sens pour une personne francophone ni conformes à la morphologie du français, on a officiellement recommandé en France, en 2010, le mot présuite pour les remplacer.
Au Québec, on a créé antépisode, mot‑valise formé de anté‑ « avant » et de épisode, et signifiant « œuvre de fiction écrite ou réalisée après une autre, mais dont l’intrigue est liée à celle de l’œuvre créée précédemment et lui est chronologiquement antérieure ». Antépisode est surtout employé au Québec, où il est attesté depuis 2005, mais à l’occasion, on le trouve ailleurs dans la francophonie. Voici un exemple où il est question de trois films québécois portant sur la crise d’Octobre ayant secoué le Québec en 1970 :
Corbo est l’antépisode que l’on attendait aux fresques cinématographiques que sont Octobre et Les ordres (M. Gignac, Métro Montréal, 17 avril 2015, p. 23).
Un dénouement heureux
Le nom antépisode, dont on devine facilement le sens, vient avantageusement concurrencer préquel, en raison de sa forme bien française.
Qu’il s’agisse d’une œuvre antérieure à un film, à une série ou à un roman, les antépisodes font le bonheur de tous les publics. Après tout, connaître le passé pour mieux apprécier le présent, c’est un principe qui vaut aussi pour la fiction.
Pour en apprendre davantage sur ce québécisme, consultez l’article antépisode dans le Dictionnaire historique du français québécois.
Références
Gignac, M. (2015, 17 avril). Le Québec moderne. Métro Montréal, Week‑end, 23.
Trésor de la langue française au Québec. (2022). Antépisode. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 22 juin 2023. https://www.dhfq.org/article/antepisode